L'un des principaux avantages de l'hydrogène est sa capacité à fournir une autonomie comparable à celle des carburants fossiles sans entrainer de rejets polluants. L'hydrogène peut être utilisé dans des piles à combustible qui convertissent l'hydrogène en électricité, en n'émettant que de la vapeur d'eau.
Des entreprises ont d’ailleurs déjà développé des prototypes d'engins de construction fonctionnant à l'hydrogène, capables d'opérer durant des heures sans nécessiter de recharge. Cette solution intéresse particulièrement les constructeurs puisqu’elle constituerait un atout majeur sur les chantiers en termes d’efficacité et de productivité. Actuellement en phase de développement, ces gammes seraient commercialisables à horizon 2026 et s’inscriraient dans la politique de décarbonation des marques. Selon une étude de l’Agence Internationale de l'Energie (AIE), l’hydrogène pourrait ainsi répondre à 18 % de la demande mondiale d'énergie d’ici 2050.
Le potentiel de la motorisation à hydrogène est accru pour les équipements lourds tels que les pelleteuses et les camions de chantier. Philippe Boucly, Président de France Hydrogène, décrit l'hydrogène comme le « meilleur des deux mondes », combinant les atouts de l'électrique et des carburants fossiles en termes d'autonomie et de rapidité. Cette technologie avantageuse s’inscrirait en complément de la stratégie de motorisation électrique sur des gammes différentes de matériel de chantier.


Les défis techniques et financiers à relever
Malgré les avancées, le coût de l'hydrogène reste un frein majeur. Le salon INTERMAT, qui s’est déroulé du 24 au 27 avril 2024 au Parc des Expositions Paris Nord Villepinte, a réuni les acteurs majeurs du secteur de la construction. Cette édition a notamment mis en lumière les défis liés au développement de l’hydrogène. C’est ce qu’ont évoqué : Bruno Munier, Directeur Performance Equipement Territoire Sud-Est chez Colas, Yann Dubosc, Maire de Bussy-Saint-Georges et président d'EPAMARNE, Markus Müller, Directeur de la technologie de Dutz AG, et Philippe Boucly, Président de France Hydrogène sur le plateau TV de l’espace filière. Un constat s’impose : les véhicules et machines équipés d’une pile à combustible sont encore onéreux par rapport aux équipements traditionnels.
Markus Müller, de Deutz AG, souligne que la réduction des coûts passera à la fois par une simplification administrative et des subventions étatiques. Le coût de production de l'hydrogène vert doit également être réduit, actuellement estimé à environ 5-6 euros par kilogramme, pour devenir compétitif par rapport à l'hydrogène provenant des combustibles fossiles, qui coûte environ 1,5 à 3 euros par kilogramme. Pour rendre l’hydrogène plus abordable, certaines initiatives sont en cours. Par exemple, le projet européen H2Global, qui vise à créer un marché international pour l’hydrogène, pourrait réduire les coûts de production et favoriser son adoption.
Actuellement, des stations d'hydrogène se développent en Île-de-France et à Dunkerque pour fournir les chantiers et flottes urbaines en énergie propre. Selon l'Association française de l'hydrogène et des piles à combustible (AFHYPAC), la France compte déjà plus de 30 stations d'hydrogène et prévoit d’en ajouter plusieurs dizaines d’ici 2030. Cependant, ces initiatives demandent des investissements importants pour créer des infrastructures viables. En Europe, les investissements dans l'hydrogène devraient atteindre 470 milliards d'euros d'ici 2050, selon le plan de l'Union européenne pour l'hydrogène.
Cela inclut non seulement la construction de stations de recharge, mais aussi des installations de production d'hydrogène vert à partir d'énergies renouvelables comme l'éolien et le solaire. Autour de la table, Yann Dubosc, maire de Bussy-Saint-Georges, rappelle l'importance de l'hydrogène « vert», produit sans émission de carbone. Pour que l'hydrogène devienne une option courante sur les chantiers, la production doit s'intensifier.
Décarboner avec l'hydrogène
Une motorisation subventionnée pour accélérer son adoption
Philippe Boucly, Président de France Hydrogène, a rappelé pendant ce débat les engagements financiers du gouvernement français : avec plus de 10 milliards d’euros alloués au développement de la filière. Bien que ces fonds visent majoritairement la production, une réorientation vers le soutien des utilisateurs finaux, à l’instar de l'Allemagne, serait cruciale pour accélérer l'adoption.
En effet, l'Allemagne a déjà mis en place des programmes de subvention qui ont permis une adoption rapide des technologies à hydrogène, notamment dans le secteur des transports et de la logistique. Des entreprises comme Engie et Air Liquide ont commencé à offrir des solutions de leasing pour les équipements à hydrogène, ce qui permet aux entreprises de réduire leur investissement initial tout en bénéficiant de technologies propres. L'hydrogène est une réponse innovante aux enjeux environnementaux dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.
Les efforts conjoints des entreprises et des pouvoirs publics devraient lever ces obstacles pour faire de l'hydrogène une énergie incontournable dans les années à venir. Les chantiers de demain pourraient ainsi bénéficier d'une source d'énergie propre et durable, contribuant à la lutte contre le changement climatique et à la réalisation des objectifs de décarbonation. À mesure que les infrastructures se développent et que les coûts diminuent, l'hydrogène pourrait bien devenir le moteur de la transformation des chantiers de demain.
Approfondissez votre expertise des enjeux qui challengent le secteur du bâtiment et des travaux publics du 21 au 24 avril 2027, à INTERMAT.




Sources :
- Agence internationale de l'énergie (AIE)
- Association française de l'hydrogène et des piles à combustible (AFHYPAC)
- Union européenne - Plan pour l'hydrogène
- Deutz AG
- H2Global
- Engie et Air Liquide
- Projet H2 Ouest